Pères Blancs

En Algérie

A Tizi-Ouzou

TIZI-OUZOU : UN NOM PAS MECONNU DANS LA SOCIETE DES PERES BLANCS

C’est dans le chef-lieu de la wilaya de Tizi-Ouzou (grande Kabylie) que nous vivons avec nos frères et sœurs Kabyles. Tizi est une plaque tournante dans cette région montagneuse où les habitants y viennent pour leurs démarches administratives et soins importants. Un peuple assez ouvert dans ses relations mais avec des limites imposées par le contexte socio-culturel.

COMMUNAUTE DES PERES BLANCS

Fondé en 1874, soit 6 ans après la fondation de la Société, il est bien de noter que la communauté de Tizi-Ouzou reste la plus ancienne de nos communautés toujours en activité.

C’est dans cette communauté, le 27 décembre 1994, que nos quatre confrères pères blancs, Alain, Charles, Jean et Christian ont connu la mort. Missionnaires vaillants et zélés de leur époque, ils ont tout donné jusqu’au bout devenant ainsi des martyrs du plus grand amour. Béatifiés le 8 décembre 2018 à Oran, Algérie, avec 15 autres, nous sommes conscients du privilège que nous avons de vivre dans cette communauté et en même temps les défis à relever en y vivant parce que c’étaient des hommes estimés et respectés grâce à leur dévouement dans la mission.

 

QUE FAISONS-NOUS AUJOURD’HUI DANS CETTE PARTIE DE L’ALGERIE ?

Notre vie à Tizi-Ouzou tourne autour de trois axes majeurs qui sont :

LA PAROISSE

Notre paroisse est une communauté multi culturelle et œcuménique. Elle est composée de Chrétiens Algériens, d’étudiants étrangers de diverses dénominations chrétiennes, et de consacrées telles que les Sœurs Salésiennes, une sœur Blanche et une vierge consacrée. Nous témoignons de l’amour du Christ en osant inventer des chemins neufs dans le zèle et le dynamisme de notre charisme afin que la paroisse soit un lieu de vie où chacun des membres se sent accepté et aimé.

Les chrétiens algériens , nous les accompagnons de près et d’une façon approfondie afin de forger dans la foi une église autochtone qui témoigne sa foi par sa vie dans une terre majoritairement musulmane.

Les étudiants étrangers , nous avons aussi un bon nombre d’étudiants étrangers venus de l’Afrique subsaharienne et qui fréquentent la paroisse. Ils ne sont pas tous catholiques, mais chrétiens et quelques-uns musulmans ; ils trouvent dans cette communauté un lieu de référence, de partage et de fraternité. Du coup, l’accompagnement des jeunes trouve largement sa place dans notre apostolat.

La visite des prisonniers constitue également un pôle de l’annonce de la bonne nouvelle aux plus petits. Cet apostolat de l’Eglise universelle qui s’impose à tout disciple du Christ fait partie de notre réalité pastorale. L’un de nous, détaché pour cet apostolat, se rend tous les quinze jours à la grande prison de Tizi-Ouzou en compagnie d’une des Sœurs Salésiennes afin d’apporter notre soutien à nos frères et sœurs qui y sont.

La moitié de l’effort de carême au niveau paroissial et communautaire est mise dans la caisse de solidarité destinée aux œuvres de la prison.

 

LA BIBLIOTHEQUE

Notre bibliothèque est officiellement nommée : Centre de Documentation et de Rencontre le Figuier. Nous accueillons les étudiants, presque tous algériens, qui font médecine, Biologie, Pharmacie, Anglais et Tamazight (berbère) afin de leur offrir un cadre convivial d’études et de rencontre.

Il est intéressant de noter qu’en plus du service autour des livres, nous rattachons à cette activité des cours de soutien scolaire et d’initiation à l’anglais et au français à des élèves du primaire, du collège, du lycée et à des étudiants et adultes. Cet apostolat auprès de la société algérienne est bien accueilli.

 

L’ACCUEIL

L’accueil dans la communauté constitue l’une de nos occupations quotidiennes. Beaucoup de personnes, algériens et étrangers, viennent frapper à notre porte pour diverses raisons. La maison ou la communauté des Pères blancs est pour beaucoup un lieu d’écoute, d’échange, de partage et de solidarité. Nous essayons dans la mesure du possible de nous mettre à l’écoute de toutes ces personnes qui viennent quotidiennement solliciter de notre aide multiforme.

 

DEFIS PASTORAUX ET PERSPECTIVES

Le défi pastoral n’est pas un moindre souci. Nous vivons dans une église où l’engagement laïc laisse à désirer. La plupart de nos fidèles sont issus de familles musulmanes et sont la plupart du temps les seuls membres chrétiens dans leurs familles. Certains restent dans l’anonymat de leur cheminement chrétien et d’autres sont connus mais avec le risque de se voir écarter de certaines réalités sociales. En plus de cela, nos fidèles algériens sont la plupart des adultes, pas d’enfants ou de jeunes que l’on pourrait compter comme fidèle.

Nous avons aussi la question de la législation religieuse qui fait que nous restons fragiles dans un certain sens dans le domaine de l’évangélisation.

La mission à Tizi-Ouzou est une mission qui a perduré depuis 1874 jusqu’à nos jours, et cela malgré toutes les zones d’ombres tragiques qu’elle a traversées. Notre présence ici est encore appréciée même si les perspectives entreprises par nos prédécesseurs sont aujourd’hui différentes des nôtres qui devaient être redéfinies avec le contexte social actuel et le besoin des personnes autour de nous. C’est exactement ce que j’ai essayé d’élaborer plus haut quand je parlais de ce que nous faisons aujourd’hui. Cette perspective pastorale peut perdurer même si de nouvelles voies pourraient être inventées mais toujours à l’écoute du contexte social et politique qui ne saurait être ignoré. Ignoré cet aspect serait mettre à risque l’œuvre et l’héritage de nos aînés et prédécesseurs dans la mission.

En plus de cela, il y a aujourd’hui la question d’origine des confrères sur place. Il y a 20 ans, les gens étaient encore habitués à ne voir que des confrères européens mais aujourd’hui nous sommes, depuis une dizaine d’année, d’origine africaine, et encore plus jeunes que nos prédécesseurs, et cela cause parfois des incompréhensions et des questionnements pour certains puisqu’ils relient l’appartenance Pères blancs à la question de la couleur raciale. On entendrait même certains dire qu’il n’y avait plus de Pères blancs ici à Tizi-Ouzou. Un défi que nous essayons de relever par notre dévouement à la mission et au patrimoine que nous ont légué nos anciens.

                                                                                             

                                                                                              Pour la communauté de Tizi-Ouzou

                                                                                              P. Philippe Dakono,